Construire, soutenir, ouvrir…
« Une municipalité ne s’occupe pas d’enseignement supérieur ! Cela relève de l’Etat. » Telle est la remarque qui m’est souvent faite depuis que Bertrand Delanoë m’a fait l’honneur et le plaisir de me choisir comme Adjointe au Maire chargée des Universités*. L’objection, il est vrai, mérite d’être entendue : l’enseignement supérieur fait partie en France des compétences exclusives de l’Etat.
Pierre-Gilles de Gennes en directeur d’école maternelle
Mais Paris est une ville exceptionnelle, dont le passé universitaire autant que la richesse actuelle justifient quelques entorses aux règles les mieux établies. Qu’on en juge : 300.000 étudiants, 8 universités*, des grandes écoles* parmi les plus prestigieuses, tant de prix Nobel ! Alors, si le contenu des enseignements, les diplômes, les professeurs, bref, la pédagogie, dépendent à Paris comme ailleurs, et c’est heureux, de l’Etat, il n’en va pas de même du patrimoine immobilier, dont de nombreux éléments, et non des moindres, sont propriétés de la Ville. Cette municipalité-ci s’est en outre engagée très fortement dans la construction, à côté de la Bibliothèque François Mitterrand, d’un nouveau quartier universitaire destiné à accueillir plus de 30 000 étudiants. Et, situation plus rare encore, certaines grandes écoles*, parmi les plus réputées de France, appartiennent même à la Ville, qui rémunère leurs professeurs et tous leurs personnels : « J’ai le statut d’un directeur d’école maternelle » aimait à me rappeler en plaisantant Pierre-Gilles de Gennes lorsqu’il était directeur de l’Ecole Supérieure de Physique et de Chimie Industrielles* de la Ville de Paris…
Un nom sur des tee-shirts
Nous pensons en effet que la présence d’étudiants, de professeurs et de chercheurs est un bienfait pour Paris et pour tous les Parisiens. C’est ce qui rend notre ville, si vivante, si riche intellectuellement et qui en fait une capitale au rayonnement mondial. C’est aussi ce qui prépare sa richesse et ses emplois de demain. La Sorbonne*, c’est à la fois un monument de notre patrimoine au cœur de notre ville, un lieu où des dizaines de laboratoires de recherche inventent les richesses du futur, une concentration de milliers d’étudiants travaillant chaque jour au développement de la connaissance, et un nom qui, floqué sur des tee-shirts portés sur tous les continents, est synonyme de Paris et de culture, et fait rêver des millions de gens… Est-il besoin de dire qu’il n’y a pas plus beau vecteur de la grandeur de notre ville ?
Une vision nouvelle
L’entretien et la rénovation de bâtiments comme la Sorbonne*, l’Ecole Nationale Supérieure des Arts et Métiers ou l’ancienne faculté de Médecine ; la construction d’un nouveau Quartier latin* ; le développement de 6 écoles aussi prestigieuses que l’ESPCI* ou l’Ecole Boulle* ; le dialogue avec la plus grande communauté scientifique et universitaire d’Europe, le soutien à des actions en faveur de l’égalité femmes/hommes dans l’enseignement supérieur, sans oublier un effort déterminé en faveur de la diffusion de la culture scientifique à Paris : il y a donc bien là de quoi construire une vraie politique universitaire, sans empiéter sur les responsabilités de l’Etat.
Cette politique, nous avons choisi, avec Bertrand Delanoë, de la fonder sur quelques axes forts, traduisant une vision nouvelle de ce que doit être la place de l’Université* dans la ville. Investir massivement en faveur de l’enseignement supérieur pour améliorer les conditions de travail d’une communauté universitaire citoyenne à part entière de Paris, soutenir de véritables « parcours de réussite »* pour les étudiants à l’université*, ouvrir les établissements sur la ville et réciproquement, faciliter leur visibilité à l’étranger, favoriser le dialogue entre la communauté universitaire et les citoyens, telles sont en effet depuis 6 ans nos principales ambitions.
Déclarer l’urgence
Elles apparaissaient largement justifiées: Paris n’avait pas signé le plan U2000 visant, à la fin des années 80, à moderniser et à construire des bâtiments universitaires partout en France. Les amphis s’étaient détériorés jour après jour, contraignant profs et élèves à travailler dans des conditions considérées par tous comme indignes. Un étudiant ou un enseignant avaient 3 ou 4 fois moins de m² pour travailler que la plupart de leurs homologues de province. Des établissements universitaires prenaient le chemin de l’exode vers les champs de betteraves. Et Paris était peu à peu en train de perdre son rang de capiltale universitaire, contestée en Europe par des capitales très dynamiques et menacée en France même par des villes ambitieuses. Il fallait donc déclarer l’urgence pour la mise en œuvre conjointement par l’Etat, la Région et la Ville du plan U3M* (Université du 3ème millénaire).
L’argent utile : 400 millions d’euros investis pendant la mandature
Dès 2001, notre premier objectif fut donc de nouer des relations de confiance et de collaboration constructive avec les établissements présents sur le territoire parisien. C’est ce que nous avons fait, en multipliant les rencontres et les coopérations, autour de projets concrets de rénovation de bâtiments ou d’organisation de manifestations scientifiques. Mais ne nous leurrons pas : sans moyens, sans de considérables moyens financiers, ces velléités seraient restées stériles.
C’est pourquoi Bertrand Delanoë a choisi de faire du développement des universités et grandes écoles parisiennes l’une des priorités de cette mandature, en investissant 400 millions d’euros, soit plus que l’Etat hors désamiantage. Mais il faut savoir mettre l’argent là où l’on estime qu’il est utile à l’ensemble des citoyens.
Une immense ambition
Pour que toutes les Parisiennes et tous les Parisiens profitent de cette richesse, nous avons contribué à ouvrir les universités* dans trois directions : une meilleure répartition des universités* sur le territoire, en particulier dans les arrondissements périphériques, un recrutement plus démocratique des universités* et une plus grande participation à la vie de la Cité, notamment par le biais d’opérations de diffusion de la culture scientifique.
Ouverture géographique : au-delà de la Montagne Sainte Geneviève au cœur de Paris, deux nouveaux pôles parisiens sont désormais lancés, qui contribuent à changer le visage de notre ville. C’est le sens des efforts importants que nous faisons dans le Nord Parisien avec le développement de Paris 4 Porte de Clignancourt, avec l’implantation d’un IUT à Pajol-Maroc pour Paris 7, et déjà, à l’Est de Paris, à Paris Rive Gauche* avec la création d’un nouveau quartier latin* autour de Paris 7, de l’INALCO et de l’école d’architecture Paris Val-de-Seine. Ouverture sociale : c’est le sens des conventions Cap en fac* que nous signons avec les universités* et des lycées, qui visent à favoriser le recrutement et l’accompagnement des jeunes lycéens parisiens issus des milieux les moins favorisés dans les universités* de Paris. Ouverture intellectuelle : c’est le sens d’opérations qui, comme Envie d’amphi* ou le Répertoire des Savoirs à Paris*, ont pour ambition d’attirer les parisiens dans les amphis, et de contribuer ainsi, modestement, à une sorte d’éducation tout au long de la vie.
C’est surtout ce que Bertrand Delanoë vient de s’engager à poursuivre et à amplifier dans les années à venir : pas moins de 411 millions d’euros à nouveau investis par la Ville dans l’enseignement supérieur entre 2007 et 2013 ! Ce serait alors un troisième grand pôle universitaire qui verrait le jour Porte d’Aubervilliers avec l’arrivée de Paris 1 et de l’EHESS et, si chacun honore ses engagements, une communauté universitaire parisienne pleinement dotée des moyens qu’elle mérite.
Construire, soutenir, ouvrir : voilà l’immense ambition que Bertrand Delanoë m’a demandé de porter pour le service public de l’enseignement supérieur à Paris. Je vous propose de passer en revue quelques uns de ces chantiers au hasard de l’ordre alphabétique…
Danièle Pourtaud
Adjointe au Maire de Paris
Chargée des Universités
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